En 2018, Kevin Chung et Xavier Zimmermann fondent Collectif Architecture Sàrl, un bureau genevois basé sur une approche collaborative alliant créativité et expertise technique.
Kevin, architecte HES / MPQ, et Xavier, architecte HES / SIA avec un master en urbanisme, ont bâti une structure à leur image, où chaque projet naît de l’échange et de l’innovation.
À travers une interview, les deux associés reviennent sur la création du bureau, les défis des débuts et leur évolution jusqu’à aujourd’hui.

Création du bureau
Qu’est-ce qui vous a poussé à créer Collectif architecture en 2018 ? Aviez-vous toujours eu cette envie entrepreneuriale ?
Kevin : Initialement, j’avais prévu de poursuivre mes études avec un master à l’EPFL mais au final j’ai travaillé cinq ans dans un bureau d’architecture à Genève. Mon engagement était clair : “Je reste tant que j’apprends.” Mais après cinq ans, j’ai ressenti le besoin de voler de mes propres ailes. Mon premier mandat en freelance, une extension de villa à Lully, a marqué un tournant. Ensuite, j’ai fait mon service civil avant de retourner travailler dans ce même bureau où Xavier à été employé entre temps. C’est à ce moment-là qu’il m’a annoncé être motivé à lancer notre propre structure.
C’est à travers cette expérience que j’ai découvert ma fibre entrepreneuriale.
Xavier : De mon côté, l’entrepreneuriat n’était pas un objectif. Je m’imaginais plutôt salarié, avec une vie de famille stable. C’est Kevin qui portait cette ambition et qui avait déjà en tête le nom et le logo de Collectif Architecture. Il avait initialement envisagé de s’associer avec quelqu’un d’autre, mais cela ne s’est pas concrétisé. Finalement, nos aspirations se sont rejointes et nous avons décidé de nous lancer ensemble.

Quelle était votre vision au départ ? Comment pensiez-vous vous différencier dans un marché aussi concurrentiel ?
Dès le début, notre vision reposait sur la réactivité et l’authenticité. Nous avons toujours voulu travailler avec intégrité, en restant fidèle à nos valeurs et à nos engagements. Il était essentiel pour nous de pouvoir nous regarder dans le miroir en fin de journée, en étant fier de notre travail. L’optimisation des processus a également été un point clé : en structurant efficacement notre manière de travailler, nous pouvions gagner du temps, une ressource très précieuse en entrepreneuriat. Enfin, nous avons toujours mis un point d’honneur à proposer un service qualitatif et transparent, où chaque projet est clair et limpide pour nos clients.
Comment est née votre collaboration ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous associer pour créer ce bureau ensemble ?
Kevin : Ce qui m’a marqué chez Xavier, c’est sa motivation et son insouciance. Il ne se mettait pas de barrières et fonçait sans hésiter. C’est aussi, sans aucun doute, l’un des meilleurs technicien que j’ai rencontrés, un véritable couteau-suisse. Cette polyvalence et cette manière de voir les choses m’ont convaincu que nous pouvions construire quelque chose ensemble.
Xavier : Pour moi, c’est son sérieux et sa rigueur qui ont fait la différence. Kevin a une véritable envie d’avancer et dès qu’il a une idée ou un projet en tête, il ne lâche rien. J’ai tout de suite su qu’avec cette détermination, on pouvait aller loin.
Le nom “Collectif architecture” n’a pas été choisi par hasard. Pourquoi avoir mis l’accent sur cette dimension collective dès le départ ?
Parce que seul, on ne construit rien. L’architecture est un travail d’équipe où chaque acteur joue un rôle essentiel : dessinateurs, maçons, peintres, nettoyeurs… Sans nos collaborateurs et nos partenaires, le bureau ne pourrait pas fonctionner. Dès le départ, nous avons voulu mettre en avant cette dynamique collective, essentielle à la réussite de chaque projet. Même notre logo reflète cette vision : l’arrondi entre le “C” et “architecture” symbolise le spectre des compétences nécessaires pour mener à bien un projet architectural.
Les débuts
Quels ont été les premiers grands défis de la création du bureau ? Y a-t-il une anecdote qui illustre bien vos premiers mois d’activité ?
Kevin : La plus grande difficulté, c’est de gérer les montagnes russes : les hauts, les bas, et surtout les aspects humains. Convaincre nos premiers clients de notre compétence et instaurer une relation de confiance n’a pas été simple. L’après-Covid a été particulièrement dur, avec trois mois sans projet. Avec du recul, je réalise que je n’avais pas assez anticipé cette période et que la prospection aurait dû être une priorité.
Un moment marquant a été une conversation avec un ami qui m’a fait prendre conscience de l’importance de déléguer. Chaque week-end, j’allais dans nos premiers bureaux pour faire le ménage, épuisé par le rythme de la semaine. Un jour, il m’a vu avec des cernes et m’a demandé pourquoi j’étais dans cet état. Quand je lui ai raconté ma routine, il m’a simplement dit : “Tes clients ont besoin que tu sois opérationnel lundi matin, pas que ton bureau soit impeccable. Pour 50 CHF, tu peux déléguer cette tâche et te reposer.” Ce conseil a changé ma façon de voir les choses : il faut savoir lâcher prise et se concentrer sur l’essentiel.
Xavier : Nos débuts ont été marqués par une certaine débrouillardise. Avant d’avoir nos propres bureaux au Port-Franc, nous nous sommes installés dans ceux d’un ami, un peu en mode clandestin. Une fois notre premier espace trouvé, on a posé le parquet nous-mêmes et aménagé tout le bureau en un week-end.
Une autre anecdote marquante, c’est notre tout premier concours d’architecture – Colibri à Sainte-Croix. Nous ne l’avons pas remporté, mais nous avons tenu à aller ensemble à la poste pour envoyer notre dossier. Ce moment symbolisait le début de notre aventure.
À quel moment avez-vous décidé d’engager votre premier employé ? Qu’est-ce qui vous a fait sentir que c’était le bon moment ?
L’embauche s’est imposée naturellement quand le volume de travail a augmenté. Les mandats se multipliaient et il devenait impossible de tout gérer seuls. On avait besoin d’une personne pour prendre en charge le dessin afin que nous puissions nous concentrer sur d’autres aspects du métier d’architecte et d’entrepreneur. Au début, déléguer n’était pas évident, il fallait apprendre à faire confiance et à lâcher prise.
Et après ?
Avec une équipe de huit collaborateurs aujourd’hui, envisagez-vous de continuer à grandir dans les prochaines années ?
C’est une grande question ! Notre priorité actuelle est avant tout de stabiliser et pérenniser l’activité ainsi que notre relation avec nos clients. La croissance ne doit jamais se faire au détriment de la qualité et c’est notre principale préoccupation. Si nous devons agrandir la structure, cela devra se faire dans le respect de nos valeurs et avec la garantie de maintenir un haut niveau d’exigence sur chaque projet.
Quelle est votre vision pour Collectif architecture dans les cinq prochaines années ?
Notre ambition est de pérenniser l’activité tout en restant fidèles aux valeurs qui nous ont guidés depuis le début. Plus qu’une croissance en taille, nous voulons bâtir une équipe solide, autonome et épanouie, où chacun trouve sa place et développe ses compétences. L’idéal serait que le bureau puisse fonctionner de manière fluide, permettant à chacun d’évoluer et à nous, fondateurs, de nous consacrer pleinement à des projets qui nous tiennent à cœur. Nous voulons faire une architecture qui nous ressemble, tout en assurant la stabilité et la cohésion du bureau.
Conseils
Quel conseil donneriez-vous à des personnes qui souhaitent se lancer dans une aventure entrepreneuriale ?
Kevin : Il ne faut jamais arrêter de rêver, mais il faut être prêt à travailler dur. L’entrepreneuriat, c’est un défi à double tranchant : il peut être incroyablement motivant, mais aussi éprouvant. Ce qui fait la différence, c’est la capacité à se relever après un échec et à se réinventer. Il faut accepter que c’est un chemin fait d’introspection et de remises en question constantes. Et surtout, ne jamais penser que l’on sait tout. Le jour où l’on croit avoir tout appris, c’est qu’on a encore tout à découvrir.
Xavier : Se lancer, c’est accepter beaucoup de sacrifices et d’heures de travail, mais aussi apprendre à gérer les hauts et les bas. L’important est de garder les pieds sur terre, rester fidèle à ses valeurs et avancer avec patience. Rien ne se construit du jour au lendemain, il faut du temps pour poser des bases solides et faire grandir son projet de manière pérenne.
Selon vous, quelles sont les qualités essentielles pour réussir en tant qu’entrepreneur ?
Kevin : La persévérance et la capacité à se remettre en question sont essentielles. L’entrepreneuriat, c’est un apprentissage constant, il faut être prêt à évoluer sans cesse. Ma cousine m’a dit un jour : “La vie, c’est comme une toile d’araignée : toute ta vie, tu la tisses et si tu prends du recul, tu verras qu’elle te ressemble.” Cette image illustre bien l’importance de construire son parcours avec patience et résilience.
Xavier : La rigueur est indispensable, tout comme la capacité à garder un regard ouvert sur l’extérieur. Il ne faut jamais se replier sur son entreprise, mais toujours rester à l’écoute des évolutions du secteur, des nouvelles tendances et des opportunités qui peuvent se présenter.
De leur première collaboration à la croissance de Collectif architecture, Kevin et Xavier ont su transformer leur vision en une structure dynamique et innovante. Leur parcours témoigne de l’importance d’une approche collaborative et d’une passion partagée pour l’architecture, une aventure qu’ils continuent d’écrire chaque jour.